Innovation : hybridation du collectif et de l'individuel

Contenu : La prise en charge collective des individus comprend de nombreuses impasses. L'individualisation de la société rend de plus en plus inacceptable les réponses uniformes et collectives aux besoins sociaux tant dans l'éducation nationale, dans les hôpitaux, les maisons de retraite par exemple ou les transports en commun.

Cependant l'individualisation des services tend à rendre les consommateurs assistés et les usagers isolés, au détriment du lien social. De plus, une individualisation extrême se heurte à des limites économiques évidentes.Les innovations de rupture repérées n'opposent plus les modes de prise en charge mais tentent de les articuler.

Ainsi le TAD, transport à la demande, constitue une réponse collective tout en tentant de s'adapter aux besoins individuels des utilisateurs. Les TAD qui fonctionnent le mieux sont ceux qui offrent une souplesse dans les horaires et dans les points de ramassage. Les dispositifs de covoiturage organisé illustrent encore mieux cette hybridation du collectif et et de l'individuel. Ils répondent aux besoins personnalisés des usagers grâce à une organisation collective.

L'ensemble des expériences repérées s'efforce de garantir l'autonomie des individus, à répondre au plus juste à leurs besoins. Pour cela, une organisation collective est mise en œuvre, gérée la plupart du temps par les utilisateurs eux-mêmes qui prennent une part active dans la formalisation de l'offre et de la demande.

Les initiatives d'habitat collectif illustrent ce processus : les participants refusent le modèle individualiste du pavillon et du lotissement, mais ne veulent pas non plus d'un habitat collectif standardisé. Ils recherchent d'autres citoyens ayant les mêmes envies pour s'organiser et créer un habitat collectif répondant à leurs besoins individuels. Étant impliqués dans la recherche de solutions, les utilisateurs producteurs de services recherchent forcément le meilleur rapport qualité-prix et restent responsables et garants du bon fonctionnement des services mis en œuvre.

LES HABILES (HABITATS ISÉROIS LIBRES ET SOLIDAIRES)
Cette association a pour but de favoriser l'émergence et la réalisation de projets d'habitats groupés en Isère. On appelle habitat groupé un projet collectif de logements dont les habitants s'impliquent dans la promotion et la gestion. Ces habitants choisissent de mutualiser des finances, des espaces, des services, du temps... pour créer un lieu de vie adapté et pérenne. L'association veut permettre aux citoyens de se (ré)approprier leur habitat et de vivre les uns avec les autres de façon solidaire, responsable et conviviale. Pour cela elle encourage l'initiative et l'autonomie des porteurs de projets, la diversité économique et sociale, ainsi que l'attention à l'impact écologique (dans la conception de l'habitat, sa construction, son usage et son recyclage).
→ Voir la fiche expérience « Les Habiles – habitat groupé en Isère »

Certains projets d'habitat coopératif se font par des personnes âgées qui refusent le choix entre maintien domicile et maison de retraite : le projet ne se limite pas à l'habitat mais également aux services mis en commun. Ces projets articulent l'individuel et le collectif, et peuvent faire appel à des dispositifs publics de type offices HLM pour participer au financement de ces opérations. Ces initiatives se heurtent cependant à la rigidité des réglementations et des mécanismes de décision de ces opérateurs publics.

Ces innovations individuelles et collectives ne sont pas pour autant exemptes de difficultés. Les stratégies de « passager clandestin » qui existent dans les services publics peuvent également se manifester dans ces groupes qui peuvent attirer des « profiteurs ». Les questions juridiques posées par ces organisations collectives restent la plupart du temps dans le flou et peuvent poser des problèmes en cas de conflits, ces derniers étant inhérents à tous groupes humains.

L'accès à ces services individuels et collectifs pour le plus grand nombre reste une question. Aujourd'hui ils se sont développés dans des milieux à capital social élevé. Le souci de la mixité sociale doit pouvoir être porté par les pouvoirs publics qui interviennent au nom de l'intérêt collectif.

Source : "Quel avenir des services en milieu rural ? Cahier des innovations", ADRETS, 2013